Marie de Rémur

Diplômée en : Image Imprimée (2022)

Zénith

Ce projet a été réalisé en 2022 dans le cadre de mon master à l’Ecole des Arts Décoratifs de Paris.

Note d'intention :
J’observe avec curiosité mon architecture propre, elle évolue, change, se précise, et forme entre ombres et lumières une toile vibrante d’émotions.

Zénith invite à faire l’expérience d’être seul.e face à soi-même, traverser le territoire universel et intemporel de l’émotion.

Pour cela, je m’essaye à cette discipline difficile qui tente de faire éclore l’indicible, par différents langages mêlés.

Ils constituent mon recueil d’études, cet ensemble est un autoportrait de ma structure interne. Entre poèmes, monotypes, peintures et sculpture se construisent des réseaux évocateurs et métaphoriques d’idées, qui mettent au premier plan des projections d’états d’âme humanisées, dans des décors plus ou moins silencieux.

Ce travail est nourri d’un besoin et d’une envie de comprendre, d’analyser et de disséquer mes sensations et mes émotions.

Peintures

Les cinq peintures à l’huile sur toile font 156 x 113 cm et la sculpture en plâtre 180 x 55 cm.

Représenter des corps en mouvement, ou relâchés, me permet de véhiculer des sentiments, des états, plus précisément les miens. C’est un travail introspectif qui nourrit ma pratique plastique. Je cherche à faire ressentir ce qui m’habite lors de la création et à proposer à chacun d’en faire lecture. Ces femmes, ces pantins sont une partie de moi.

Leurs décors désertiques, les tâches rouges lumineuses et dansantes, l’absence d’architecture, nourrissent un imaginaire qui les extirpent du réel, et leurs offrent un cadre intemporel et non spatial. Elles sont dans des non-lieux de mon cerveau, sans doute un peu bloquées dans ces espaces sans limites. Ce sont des projections.

Les amas de matières rouges, comme attirés par leurs corps, métaphorisent un trouble neuronal, connu sous le nom TDA(H), le trouble et déficit d’attention (avec ou sans hyperactivité). Ces formes lumineuses comme des parasites viennent me distraire, m’animer, me bloquer, me menacer, m’envahir.

Ce trouble est physique, pour le partager il était nécessaire de le rendre visible, je cherche à communiquer l’expérience que je fais de ce trouble depuis mes jeunes années.

Poèmes et monotypes

Ces 4 monotypes mesurent 65 x 50cm pour une image de 50 x 37cm.

Le recueil Zénith est composé de 23 poèmes, répartis en trois chapitres dans cet ordre : Nadir, Horizon, et Zenith. Tout trois désignent la position du soleil par rapport à un individu à un instant T mais caractérisent dans cet ouvrage trois états émotionnels intenses : être au plus bas, se sentir capable de renaître, rayonner. Les individus porteur du TDAH doivent très souvent faire face à leur hypersensibilité et doivent gérer des flux d’émotions forts. Le soleil suit sa trajectoire, les virages s’enchaînent, on s’habitue aux saisons, on reconnaît les aspérités du voyage.

L’ouvrage met en avant l’importance de l’acceptation, travail qui permet de trouver dans les failles des racines et des jeunes pousses fertiles.

L’édition du recueil Zenith été façonnée en Leporelo, et mesure 37,5 x 30cm. Elle se déploie et se lit comme on le souhaite, les monotypes se manipulent et s’associent librement au texte, ils peuvent se glisser dans les plis de l’édition.

Tous les penchants de mon trouble ont été ma sources d’inspirations pour l’écriture du recueil mais aussi pour une série de monotypes qui dialoguent avec les textes dans cette partition.

Le monotype est une technique peu protocolaire. Bien qu’il soit imprimé en atelier de gravure, son impression unique le positionne dans le monde de l’estampe avec beaucoup plus de fugacité. Ce processus court m’a aidé à capturer des états d’âme sur le vif. Comme pour mes peintures, les images se concentrent sur le corps, ce sont des projections de mon état interne.

Encore ici, les décors sont silencieux et déserts, sans repère de temps et d’espace.

Les monotypes en couleurs mesurent 50×32,5cm pour une image de 38x28cm.

Sculpture

J’ai de la puissance dans le ventre.

Des larmes épuisent mes yeux, c’est très fort

comme souvent. Je ne saurai le dire, il y a des sentiments 
qui ne pourront sortir, ils resteront pourtant 
en mousse sur mon corps car ils me suivent partout, 
collés à mes mains, à mon visage.

Il y a des années que je me trimballe un tas de rochers, 
de sédiments et de parasites en tous genres,
mais surtout ces petits bouts de cette mousse
qui se voit mais qui ne dira rien de moi.

Le langage semble pauvre et grossier et ne saurait rien raconter de mes expériments, 
des histoires qui m’écrivent. 
Je reste inerte, immobile à chercher tous les jours
les signes, les rythmes et les images.

Avec les mots, ridicule, je tente de délivrer
un suintement, quelques gouttes, de ce qui fait
ma traverse.

Son courant tape contre toute ma coquille, me caresse, des larmes épuisent mes yeux, 
j’écris à l’ombre de la lumière qui me hante, qui me trahit, muette je plonge.

Je cherche, mais tout ce que je trouve

c’est de la mousse, qui ne veut rien dire 
et qui ne parlera pas plus que moi.

Un jour ça sortira vraiment de mon ventre, d’ici là
je cultive dans les profondeurs ce qui me rend humaine, 
j’alimente cette faune.

Sculpture en plâtre réalisée à partir d’un moulage à la bande plâtrée, elle mesure 180 x 55 cm.

La sculpture illustre le poème ci-dessus. Elle incarne la dernière pièce de l’installation, comme une ouverture à l’acceptation de soi.