Diplômée en Design Textile & Matière (2021)
Mail: roxane.celerier@gmail.com
Tel: +33 6 74 50 26 49
LI: Roxane CELERIER
Ig: @roxanecelerier
Très sensible et engagée sur les questions environnementales et sociales, Roxane Célérier insuffle cette recherche de sens dans son travail.
À l’occasion de son Master, elle écrit un mémoire, intitulé Vice-Versé: le designer et son éthique au sein des Grandes Entreprises, qui soulignait l’importance de s’engager en tant que designer.
En 2020, lors de la semaine de conférence Ethics by design, elle présente les réflexions inhérentes à ce mémoire. Elle y aborde alors le thème du design et de la décroissance devant 150 personnes.
Vers le fini et l’au-delà
« La planète et l’humanité auront atteint un ‘point de non-retour’ à la moitié du siècle, dans laquelle la perspective d’une Terre largement inhabitable entraînerait l’effondrement des nations et de l’ordre mondial. »
Ian Dunlop et David Spratt, Existential climate-related security risk: A scenario approach, 2019
Le designer a pour nécessité d’être en avance sur son temps, de prévoir les tendances et de pouvoir les transmettre. Or si la tendance était à la perdition de tout un système ? Comment le communiquer ? Comment parler de l’indicible ?
Exit la simple affiche placardée que l’on ne voit même plus par son omniprésence aliénante. La tenture devient alors un moyen d’expression à part entière. Exposée, elle se revêt de l’essence noble et sensible du textile. On s’y arrête, on l’observe et on s’interroge. L’oeuvre, de par sa matière, perdurera comme une pièce manifeste de son temps. Elle marque ainsi la fin d’une ère ultra-rapide.
Puisque le support est décidé, de quel façon peut-il communiquer sur le mouvement. L’utilisation de la technologie devient, ici, pertinente. Le QR, né dans les années 80, ne s’est développé en France que depuis l’arrivée du Covid-19 avec l’installation des nouvelles normes sanitaires. Or la pandémie que nous vivons est considérée par de nombreuses personnes, comme la première vague visible en Occident de l’effondrement. QR code et Covid-19 sont marqués dans l’histoire de façon conjointe.
Une dichotomie se fait ressentir. Le tissu, issu du monde tactile, s’avère intouchable. Son utilisation se modifie avec l’apparition du QR-code qui nous renvoie au monde du numérique, de l’immatériel. La sensibilité du textile, de l’émotionnel, est alors remplacée par la froideur des nouvelles technologies. À souligner, le textile -et plus particulièrement le jacquard (métier sur lequel sera tissé la tenture)- est considéré comme l’ancêtre de l’ordinateur donc du numérique. Ici, subsiste un lien filial qui permet à chacun de s’alimenter.
Mais comment captiver l’esprit du spectateur, le happer dans ce monde ? Le ludique peut ainsi être une porte d’entrée vers ce cheminement. Les QR codes entrainent à faire des choix et agir. Le jeu stimule l’intérêt, il permet de se projeter plus facilement dans une expérience difficile, en s’entrainant tel un robinson à vivre des aventures encore inconnues. Les actions seront évolutives, à l’instar de la tenture. Le spectateur doit faire des choix de plus en plus difficiles et éloignés de ses préoccupations quotidiennes. Le spectateur est plus qu’un simple regard, il devient un acteur du moment présent. Il prend des décisions et devient capitaine de son futur. De plus, la dérision est un moyen de désamorcer certains sentiments trop violents. Le but n’est pas tant de proposer des solutions figées mais d’ouvrir une fenêtre sur un futur en marche. Il s’agit d’inciter à prendre conscience, se renseigner et amener à réagir.
Le numérique étant très énergivore, je devais m’interroger sur un moyen de limiter sa consommation énergétique. Je suis alors repartie sur l’esthétique des premiers jeux du marché avec une colorimétrie noire et blanche. Le noir, consommant le moins, il est devenu ma couleur de fond. Pour les textes, j’ai décidé de réaliser une gradation du blanc, couleur qui consomme le plus, au gris. La gradation se fait au fil du déroulé des interactions et de l’évolution dans la temporalité. Faisant écho à un futur incertain où l’énergie sera rare. À cela, s’ajoute la création de ma propre typographie pour les différentes phases des jeux. Partie de la typo Avenir, j’ai au fur et à mesure fait disparaître des parties de lettre, renvoyant à ce futur brouillé.
Ainsi, on retrouve un système de construction identique, aussi bien pour la tenture qui se désagrège, les jeux de plus en plus lointains dans le temps et les préoccupations avec une esthétique qui s’efface aussi bien par la couleur que par la typographie.
